« Je rêve d’une route bordée de peupliers et de platanes. Une glaise ocre semée de cailloux, garde une empreinte légère de mes pas lourds, et la piste s’allonge, sinueuse, serpentant entre les bosses humides de collines vertes et inconnues. Le ciel à peine teinté de sang, s’étire à l’horizon au-dessus d’une brume épaisse aux couleurs froides. La nuit s’avance dans l’heure du couchant. Et je marche, invulnérable pour un temps encore, rassurée par la douce morsure du froid.
Il y a longtemps maintenant que je parcours ces lieux, longtemps comme l’éternité qu’on prête à mes semblables… En rêve nous voiyons le jour. Nos visages pâles et fades comme celui d’un mort, à la peau de nacre retourne les sangs. Nous ne regrettont pas le jour, mais juste l’or du matin évanescent ou la pourpre des soirs crépusculaires, déchirant encore nos mémoires engourdies, l’emplissant de regrets amers…
Il y a si longtemps qu' existe notre caste... Depuis les premières nuits, depuis les premières frayeurs, tapis dans l’ombre, nous sommes ce qui prive l’homme honnête du juste repos qu’il mérite… De cette époque étrange et lointaine où la vie s’arrêtait avec le sommeil et la fin du jour et commençait avec le chant du coq.
Pour certains nous sommes de vieux mythes poussiéreux, drapés de mystère et nappés d’angoisse, des créatures immondes qui vivent accrochés à la vie des autres, pour d'autres des êtres troublants dont le baiser mortel est objet de désir…
NOUS SOMMES LES NECROMANTS »